Turgot, Mémoire au roi sur la tolérance (1775)

Turgot, contrôleur général des finances, s'efforça d'obtenir de Louis XVI la suppression de la formule : "Je jure de supprimer l'hérésie" dans le serment prêté le jour du sacre.

Les défenseurs de l'intolérance diront-ils que le prince a droit de commander quand sa religion est vraie et qu'alors on doit lui obéir ? Non, même alors, on ne peut ni ne doit lui obéir ; car si l'on doit suivre la religion qu'il prescrit, ce n'est pas parce qu'il le commande, mais parce qu'elle est vraie ; et ce n'est pas, ni ne peut être, parce que le prince le prescrit qu'elle est vraie. Il n'y a aucun homme assez absurde pour croire une religion vraie par une pareille raison. Celui donc qui s'y soumet de bonne foi n'obéit pas au prince, il n'obéit qu'à sa conscience; et l'ordre du prince n'ajoute, ni ne peut ajouter, aucun poids à l'obligation que cette conscience lui impose. Que le prince croie ou ne croie pas une religion, qu'il commande ou ne commande pas de la suivre, elle n'en est ni plus ni moins ce qu'elle est, vraie ou fausse. L'opinion du prince est donc absolument étrangère à la vérité d'une religion, et par conséquent à l'obligation de la suivre : le prince n'a donc, comme prince, aucun droit de juger, aucun droit de commander à cet égard ; son incompétence est absolue sur les choses de cet ordre, qui ne sont point de son ressort, et dans lesquelles la conscience de chaque individu n'a et ne peut avoir que Dieu pour seul juge.


Joseph II, Edit de tolérance (1781)

Cet édit devait s'appliquer à l'ensemble des Etats autrichiens de l'Empire.

La religion catholique seule jouira de la prérogative d'un exercice public de son culte ; mais les deux religions protestantes et la religion grecque non unie auront la permission d'exercer le leur d'une manière privée, dans tous les endroits où le nombre spécifié plus bas, et les facultés des habitants le permettront.

Sa Majesté permet en particulier

1) Que les sujets catholiques qui se trouveront au nombre de cent familles pourront se rendre à l'oratoire [de leur culte] le plus voisin[ ...], que leurs ministres, sujets de Sa Majesté, pourront visiter ceux de leur croyance, les instruire et administrer les malades.

2) Il leur est permis de constituer leurs propres maîtres d'école. La direction des écoles établie ici aura cependant l'inspection sur eux quant à ce qui concerne la méthode et la direction de l'enseignement.

6) A l'avenir tous les enfants d'un père catholique seront élevés dans sa religion; ce qui doit être considéré comme une prérogative de la religion dominante, mais lorsque le père est protestant et la mère catholique, les garçons suivront la religion du père et les filles celle de la mère.