Première découverte

En août 1837, Victor Hugo entreprend un voyage d’agrément en Belgique, il est accompagné de Juliette Drouet. Il dessine beaucoup et écrit de nombreuses lettres principalement à Adèle restée à Paris, qui lui reproche d’ailleurs d’être trop descriptif et pas assez sentimental. Au cours de son périple à travers notre pays, Hugo fait de multiples découvertes – la bière par exemple qui « a un arrière-goût de souris crevée » –, admire l’architecture des églises et les peintures de Rubens, par exemple. Comme beaucoup de touristes (oserai-je dire « français » ?), il se montre assez condescendant envers les « braves Belges », rempli de préjugés et ne comprend pas bien nos différences linguistiques : « J’admire comme ils parlent flamand en français. Ils ont un n’est-ce pas qu’ils mettent à toute sauce. »

Voici trois noms pris à peu près au hasard sur les devantures de boutiques à Namur ; tous trois ont une signification. – L’épouse Debarsy, négociante. – On sent, en lisant ceci qu’on est dans un pays français hier, étranger aujourd’hui, français demain, où la langue s’altère et se dénature insensiblement, s’écroule par les bords et prend, sous des expressions françaises, de gauches tournures allemandes. Ces trois mots sont encore français, la phrase ne l’est déjà plus. – Crucifix-Piret, mercier. – Ceci est bien de la catholique Flandre. Nom, prénom ou surnom, Crucifix serait introuvable dans toute la France voltairienne. – Menendez-Wodon, horloger. – Un nom castillan et un nom flamand soudés par un trait d’union. N’est-ce pas là toute la domination de l’Espagne sur les Pays-Bas, écrite, attestée et racontée dans un nom propre ? – Ainsi voilà trois noms dont chacun exprime et résume un des grands aspects du pays ; l’un dit la langue, l’autre la religion, l’autre l’histoire.

Comme le fait remarquer J.-M.Hovasse, Hugo considère la Belgique comme un État transitoire, destiné à être absorbé par la France.