Arts
Musique
Le Don Giovanni de Mozart sur un livret de Da Ponte éclipse toutes les autres adaptations musicales du mythe. Il s'agit d'un "dramma giocoso", inspiré de la version de Tirso de Molina et qui sera joué pour la première fois à Prague en 1787.

Cet opéra se caractérise par le petit nombre d'airs que chante le héros, suaves, ironiques, en contraste avec l'atmosphère de jugement dernier de la scène finale. L'aspect tragique de l'œuvre est suggéré par l'élément orchestral qui met en valeur l'antagonisme entre Don Giovanni et le Commandeur, personnification de la fatalité. C'est Anna qui oriente la pièce vers le tragique au contraire du valet Leporello, présenté comme réfléchi et prudent. De plus, la fusion s'opère pratiquement entre maître et valet, d'autant plus que les chanteurs ont la même tessiture. Cet opéra est un spectacle total qui met l'homme face à la vie et à la mort. Bien que le lien avec le sacré soit évacué - l'objectif du compositeur et de son librettiste étant de frapper les esprits et de renforcer les effets spectaculaires afin de saisir les spectateurs du côté terrible de l'action -, Dieu dont Don Giovanni a trop voulu s'écarter le retrouve dans son destin, la femme et la mort; cette thématique apparaît dès l'ouverture dans un chant de mort.

Don Giovanni se montre joyeux et fier, il choisit la mort plutôt que de renoncer à la liberté: il est saisi par sa révolte. Au-delà du bien et du mal, il manifeste une sensualité effrénée, une joie innocente qui font de lui le jouet de chaque instant dont il attend l'infini. Comme dans les autres opéras du siècle, le personnage fait figure de collectionneur, comme le révèle "l'air du catalogue" .

La critique sociale n'est pas absente, en effet Don Giovanni apparaît comme une caricature de grand seigneur du XVIIIe siècle (comparable à Valmont ou Casanova) face à Masetto, le paysan révolté mais d'autres thèmes apparaissent également: Don Giovanni est un héros spontané guidé par sa nature, un "ogre" qui veut tout tout de suite sans se préoccuper des autres. C'est aussi l'apôtre de la liberté prométhéenne, dense et absolue, hors de dieu, dans l'absence de morale et de religion. C'est l'homme de l'instant sans regard pour le passé ou le futur qui veut rester aveugle à la venue de la mort. 

Mozart hésite entre l'accusation du noble dévoreur de femmes et la pureté du désir, alliée à la liberté face à la mort. Il révèle également les ombres de sa génération: l'appétit d'être des personnalités en révolution, le besoin de s'imposer, d'effacer le passé et de conjurer l'avenir. 

Pour Rank, Mozart a été influencé par les morts de son père et de son meilleur ami Barisani. Selon la psychanalyse, la mort du père provoque en effet des réactions affectives ambivalentes, ce qui explique que Don Giovanni soit en rupture entre une sensualité sans frein et un sentiment de culpabilité ainsi que la crainte du châtiment. Il oscille sans trêve entre la joie de vivre et la crainte de la mort. Cette quasi simultanéité des sentiments est traduite magnifiquement par la musique. 

Kierkegaard disait que, pour comprendre Don Juan, il faut écouter Mozart.

 
Autres Oeuvres:
Cinéma (pour trouver une liste exhaustive voir l'ouvrage de C.Biet)
  • 1922: Marcel L'Herbier, Don Juan et Faust: film muet 
  • 1949: V.Sherman, Les Aventures de Don Juan, avec E.Flynn
  • 1955: I.Bergman, L'Oeil du diable, avec Jarl Kulle et Bibi Anderson
  • 1965: M.Bluwal, Dom Juan (version télévisée), avec Michel Piccoli et Claude Brasseur
  • 1973: R.Vadim, Don Juan, avec Brigitte Bardot
  • 1979: J.Losey, Don Giovanni, adaptation de l'opéra de Mozart avec Ruggero Raimondi, Kiri Te Kanawa et José Vandame
  • 1998, J.Weber, Don Juan, avec Jacques Weber et Michel Boujenah
Arts plastiques

Le personnage de don Juan a inspiré plusieurs artistes peintres, surtout aux XVIIIe et XIXe siècles:

  • G.B.Bison, Don Juan, le duel, aquarelle (fin du XVIIIe siècle)
  • Ch.Ricketts, Don Juan, peinture (fin XIXe siècle)
  • Ford Madox Brown, Haidé découvrant Don Juan, d'après Byron (XIXe siècle)
  • Alex-Evariste Fragonard, Don Juan, Zerline et Donna Anna et Don Juan et la statue du Commandeur (XIXe siècle)